De l’outil à la machine, histoire des techniques jusqu’en 1800 par Jean BAUDET

Éditions Vuibert 2004 Notes de lecture

Introduction

La technique est une production de l’humanité, elle en est le signe. La combinaison des techniques deviendra technologie, signe des temps « modernes ». Le livre délaissera cependant les domaines du vivant, agriculture et médecine.

En fait ce livre faire ressortir le fil conducteur techno-logique de l’origine à 1800, fin d’étape qui en est aussi le tournant avant l’accélération des siècles suivants.

Cette évolution des techniques à la technologie marquera aussi celle des métiers qui passeront de l’artisanat avec les arts et métiers à l’industrie avec l’ingénierie.

Les origines de la pensée technicienne

L’homme succède à l’animalité il y a quelques millions d’années, sans doute dix, par l’invention de l’outil dont le perfectionnement par empilement sera lié à sa propre évolution.

Cela amène à distinguer les techniques animales, celle de l’araignée qui construit sa toile par exemple comme un prolongement immuable de son espèce de l’homme qui est dans une dynamique de perfectionnement continu.

L’outil se définit par 3 caractéristiques, il est prélevé dans l’environnement, il est utilisé pour faire ce que le corps seul ne peut pas faire et enfin il est modifiable dans sa forme et dans sa fonction. Ainsi les proto-outils qui ont commencé à être créés par les primates il y a 10 ou 20 millions d’années correspondent-ils à cette définition.

On distingue dans l’évolution de l’homme, tout d’abord les chasseurs-cueilleurs au cours de l’éolithique, âge de la pierre éclatée, puis du paléolithiques, époque de l’Homo erectus, âge de la pierre taillée enfin les cultivateurs et éleveurs sédentaires, le néolithique,  âge de la pierre polie à partir de – 8500 ans.

La pierre taillée permet de commencer à tuer et valoriser des animaux et en conséquence à améliorer la nourriture en apportant plus facilement les acides aminés essentiels. Elle permet aussi de façonner des habitats, début de la menuiserie. Le feu découvert il y a environ 400 000 ans améliore les conditions de vie, chauffage, éclairage, cuisson, et permettra l’élaboration des objets métalliques.

Classification des techniques :

  • de l’espace, génie civil, véhicules, constructions
  • de la matière, production agro-alimentaire, chimie industrielles, métallurgie et minéralurgie, productique
  • de l’énergie, production, transport et distribution
  • de l’information, informatique, télécommunications, télématique, gestion, intelligence artificielle
  • les techniques « de la vie » sont dispersées parmi les 4 précédentes

La révolution néolithique

Elle est marquée par le début de sédentarisation à partir de -10 000 ans soit à la fin de la dernière glaciation. La vie sédentaire dégage du temps libre qui permettra le perfectionnement des outils avec la pierre polie et le développement de l’habitat d’abord sus forme de fosses avant de passer à l’élévation de constructions au-dessus du sol, puis de l’urbanisation avec la première ville connue, Jéricho dans la vallée du Jourdain en 7 800 avant notre ère.

Les débuts de l’agriculture sont situés au Croissant Fertile, zone qui part de la basse vallée du Nil, Israël et la Palestine et contournant le désert d’Arabie en Mésopotamie jusqu’au début du Golfe Persique dans les vallées du Tigre et de l’Euphrate.

L’observation et la sélection ont permis l’émergence de 3 grands systèmes alimentaires, maïs-haricot, riz-soja et blé-pois. L’exemple du blé (genre Triticum) montre bien les évolutions qui relient les 5 principales espèces : l’engrain, l’amidonnier, l’épeautre, le blé dur et le blé tendre.

L’espèce sauvage T Boeoticum (Grèce, Turquie, Syrie, Irak) a donné l’Engrain par domestication. Son hybridation avec Aegylops Longissima (éloigné de Triticum mais pouvant s’hybrider avec lui) (Turquie Syrie, Israël, Irak) a donné T . Dicoccoïde, ancêtre sauvage de l’amidonnier et du Blé dur.

L’espèce sauvage Aegilops  Squarrosa  (Turquie, Irak, Crimée) hybridée naturellement avec T Dicoccoïde est à l’origine de l’épeautre et du froment.

Il faut cependant préciser que ces évolutions de la main de l’homme qu’on appelle agriculture se sont produites également en Asie, en Amériques et en Afrique (Éthiopie). Cependant le Proche Orient avait à la fois une grande diversité végétale et une grande diversité animale qui ont permis à l’agriculture et à l’élevage de se développer.

Après avoir été intéressés par les belles pierres les hommes se sont intéressés aux métaux natifs tels que l’or, l’argent et le cuivre pour leur aspect esthétique et brillant au polissage. Le cuivre martelé acquerra des propriétés lui permettant d’en faire des outils et des armes.

L’usage du feu sur ces métaux a permis de réaliser des alliages et du moulage. Les températures élevées obtenue par la combustion du bois et la présence de charbon de bois ont permis d’extraire le cuivre de son minerai, c’est l’invention de la métallurgie. Cette opération en présence de minerai d’étain permet d’obtenir du bronze, matériau beaucoup plus dur et pouvant ainsi rivaliser avec la pierre.

L’âge du bronze commence en Mésopotamie à la fin de 4ème millénaire avant JC.

Le dressage de pierres monumentales, les mégalithes, en menhirs et dolmens nécessite tes techniques et une main d’œuvre nombreuse qui évoque la naissance des travaux publics.

L’invention de la corde aura de multiples applications de l’arc à l’archet, précurseur de la machine, transformant un mouvement de va et vient en mouvement circulaire.

L’entrelacement de végétaux souples aboutira à la vannerie et plus généralement au tissage avec de multiples applications, pour le transport, l’habillement, la construction…

Ainsi, la période néolithique a vu la naissance d’objets qui n’existaient pas dans la nature.

La Haute Antiquité

Toujours dans le Croissant fertile se développent des sociétés organisées sous la direction d’une caste dirigeante utilisant des systèmes techniques élaborés pour la construction, la métallurgie, la céramique ou la verrerie.

En Mésopotamie verra aux Vème et IVème siècles  le développement de cités telles que Troie, El Obeid, Our, Ourouk et Lagash. C’est probablement là que l’écriture a été inventée sur la base de dessins symbolisant des objets, c’est l’écriture idéographique qui évoluera en écriture phonétique associant syllabes et sons.

C’est l’écriture qui marque le passage de la préhistoire à l’histoire avec en parallèle l’invention de la comptabilité, un des fondements de l’organisation. La confection de tablettes d’argile cuite permettra de donner aux écrits un caractère inaltérable. L’écriture et la comptabilité permettront la création de grandes sociétés organisées.

L’invention de la brique permettra de dissocier la fabrication du matériau, standardisable et stockable de celle de la construction.

En parallèle les égyptiens inventent une autre forme d’écriture les hiéroglyphes, associant les idéogrammes et les signes phonétiques. Ils inventent le papyrus, à partir de lamelles de roseaux finement découpées. Ce nouveau support sera un net progrès par rapport aux tablettes d’argile, plus léger, permettant d’écrire et aussi de dessiner et de peindre.

Ils inventent également le marteau à manche, le pic de mineur, le soufflet à outre et vers 1700 avant JC le verre et aussi la chaux, produite par calcination des pierres calcaires. Cependant ils n’utiliseront le bronze que 2 000 ans après les mésopotamiens.

Les Hittites, peuple situé en Anatolie a inventé le fer et le forgeage vers 1 700 av JC ce qui leur donnera une supériorité militaire associée à l’utilisation des chevaux en cavalerie face aux civilisations vieillissantes d’Égypte et de Mésopotamie.

Les Phéniciens (au niveau du Liban actuel) inventent l’écriture alphabétique vers 1 300 avant notre ère.

En résumé, les techniques de la représentation de la pensée évoluent selon le schéma suivant :

  • au Paléolithique, « invention » du langage par les sons
  • Au Néolithique, invention  de l’écriture pictographique. Les choses sont représentées par des sons et des dessins.
  • Diversification régionale : hiéroglyphes en Égypte et cunéiformes (traces laissées dans l’argile par une pointe de roseau) en Mésopotamie
  • L’écriture phonétique en Mésopotamie, les choses étant représentées par des séquences de signes représentant de sons ou des syllabes.
  • L’écriture alphabétique inventée en Phénicie, les choses étant représentées par des mots chacun étant une séquence de son associée à une séquence de signes, les lettres, une vingtaine au total.

Les mécaniciens grecs

Il y a environ 3000 ans av JC la Grèce fut le théâtre d’une guerre fratricide entre les Mycéniens et les Doriens tous deux appartenant à la branche indo-européenne venue du Nord. Les Doriens sont à l’âge du fer alors que les Mycéniens sont à l’âge du bronze, ce qui leur donnera une supériorité militaire. Cependant au fil des siècles la fusion de leurs cultures  donnera naissance à la civilisation du « Moyen Age »  Grec avec la pensée philosophique, la tragédie, les mathématiques associées aux techniques, le tout étant transmis dorénavant par l’écrit.

Au 8ème siècle avant notre ère, un poète, Homère, publie l’Iliade qui raconte la guerre de Troie et l’Odyssée les voyages aventureux d’Ulysse. Ces textes font état des techniques et de l’ingénierie militaire qui mettent en évidence les nouveaux métiers d’ingénieur et d’architecte.

À la fin du 7ème siècle et au début du 6ème se développe la pensée rationnelle qui réfléchit à la nature des choses (la physique) qui met en doute l’existence des dieux et leur intervention dans les affaires de hommes (l’éthique) et qui se donne pour but ultime l’organisation de la Cité (la politique). La technique se libère peu à peu de la magie comme savoir-faire efficace.

Les Grecs furent d’excellent constructeurs marins avec des bateaux à rame (sur 3 niveaux en 704 av JC) et à voile qui leur permis de coloniser le pourtour de la méditerranée avec Cumes, Syracuse, Cyzique, Byzance, Lampsaque, Sélinonte…

Le système militaire Grec était essentiellement défensif avec casque, armure, épée,  lance et aussi arc.

La céramique se développe en production de masse pour partie exportée. Elles ont une grande variété de formes élégantes et sont décorées. Vers 600 les céramistes inventent les couleurs rouge et noire par un choix de chauffage et d’oxygénation.

Au 6ème siècle Théodoros de Samos invente le niveau, l’équerre basée sur les proportions 3, 4 et 5, cas particulier du théorème de Pythagore. On attribue l’invention de la poulie à Archytas de Tarente vers 400.

Dans le domaine métallurgique, les Grecs savent isoler l’argent des minerais de plomb argentifère, maitriser l’alliage du cuivre et du zinc (sous forme de calamine) appelé orichalque aujourd’hui laiton, l’électrum, alliage d’or et d’argent.

L’intérêt des Grecs pour les minéraux a donné lieu à la rédaction de traités, les lapidaires, sur les qualités et vertus des pierres.

Énée le Tacticien publie le 1er livre sur les techniques en 366 citant la poliorcétique, technique de prise et de défense des villes. Il évoque aussi la lubrification de nature à diminuer les frottements. Il décrit la machinerie militaire à passe d’accumulation d’énergie par tension, ou par torsion.

Archimède, mort en 212 avant notre ère, est le premier à relier clairement mathématique et technique. Il formalise la statique, lois d’équilibre des corps, la loi du levier, celle du centre de gravité. Il a également fondé les bases de l’hydrostatique, notamment la notion de poussée qui donnera le théorème d’Archimède.

Sous le règne d’Alexandre le Grand et la création de son empire poussant ses limites jusqu’à l’Indus, à l’Ouest de l’Inde, la confrontation du rationalisme Grec à la pensée orientale stimule la pensée intellectuelle mais en déplace le centre de gravité vers Alexandrie.

Le rationalisme Grec fondé par Thalès atteint son apogée sous Platon qui fonde l’Académie en 387 à Athènes. Ce système de pensée s’applique à toutes les réalités mais particulièrement orienté vers la résolution des problèmes moraux et politiques. La mathématique est considérée alors comme la base de tout savoir. Aristote, élève de Platon, créera le lycée en 336 à Athènes.  Il ajoutera au raisonnement mathématique l’observation de la nature.

Athènes restera plutôt Platonicienne alors qu’Alexandrie sera plutôt Aristotélicienne. Les intellectuels d’Alexandrie exploreront aussi bien les mathématiques pures que l’astronomie, la géographie, la médecine, l’ingénierie ou la nature. Le Musée  d’Alexandrie est fondé vers 290.

Les machines simples sont le plan incliné, le levier, le coin, la poulie, la vis, le treuil qui devient cabestan sur une axe vertical. Les ingénieurs d’Alexandrie inventent le palan.

Au 3ème siècle est inventé le parchemin (peaux années et épilées) plus solides que le papyrus et sur lequel on pouvait écrire des 2 côtés, et effacer.

Dans la première moitié du 3ème siècle à Alexandrie, Ctésibios invente le système cylindre-piston avec des soupapes qui aboutit à la pompe aspirante et refoulante à partir de 2 cylindres.  Ce système lui a permis aussi de fabriquer un orgue hydraulique. Il fabrique également des automates mus par un tambour dont la rotation est assurée par un poids.

Philon de Byzance décrit notamment les mécanismes à engrenages au 3ème s.

Au 1er s Héron d’Alexandrie invente l’éolipyle, objet sans application concrète qui transforme la chaleur en mouvement par l’intermédiaire de la vapeur. Il imagine que l’élasticité des métaux pour concevoir la chirobaliste, précurseur de l’arbalète. Ce projet n’a pas connu de mise en œuvre faute de savoir fabriquer des aciers.

Ce génie inventif de Grecs, outre les limites liées aux matériaux, s’est heurté au système d’esclavage qui rendait la mécanisation inutile.

Avec Aristote notamment les Grecs avaient conscience que les métaux formaient une famille pat leur brillance, leur densité, leur fusibilité et leur malléabilité. Le mercure est découvert probablement au 4ème siècle.

Les Grecs avaient également étudié l’optique et mis au point des miroirs qui concentraient les rayons lumineux jusqu’à provoquer l’incendie des bateaux ennemis,  principe du jour solaire.

Les ingénieurs romains

Les Romains ont su apprendre des Grecs et des Gaulois. Ils emprunteront au Gaulois l’étamage (trempage du cuivre dans l’étain) et le savon. Ils inventeront la voute et la coupole.

Ils ont su utiliser le mortier inventé par les Égyptiens et aussi le rendre plus solide en remplaçant le sable par la pouzzolane abondante autour du Vésuve, ce qui en fait un mortier hydraulique c’est-à-dire capable de durcir dans l’eau.

Les Romains ont aussi beaucoup développé la peinture des tissus, du verre et la bijouterie. Si le soufflage du verre a été inventé en Syrie avant JC, les Romains vont diffuser très largement cette technique pour faire des récipients et des verres plats.

Au 1er siècle après JC, Frontin publie un livre sur les aqueducs de la ville de Rome. Ce livre fait état des avancées sur les mesures et la normalisation indispensables pour communiquer et coordonner les fabrications. Autre invention de ce siècle, le codex ou reliure des parchemins par la gauche, qui remplace le volumen (rouleau).

Avec le déclin de l’empire Romain et l’influence orientale,  la magie et le mysticisme ont tendance à reprendre le dessus et du coup à freiner les découvertes scientifiques pendant quelques siècles..

AU 4ème siècle des travaux soumettent les métaux à toutes sortes de traitements tels que le chauffage, le mélangeage ou la mise en contact avec toutes sortes de substances. Marie la Juive invente le bain-marie.

En résumé les Romains n’ont pas atteint le niveau d’abstraction des Grecs voire l’ont oublié mais ils ont été de remarquables développeurs de ces techniques au service d’une société organisée dont le niveau de vie était remarquable pour l’époque.

Le moyen Age, les pierres et l’eau

Cette période est plutôt celle de l’héritage maladroit des Grecs et des Romains avec cependant 3 innovations techniques majeures, les châteaux forts, les cathédrales et les moulins.

Le chute de l’empire Romain au 5ème siècle a laissé la place en Occident aux barbares venus du Nord, les Wisigoths, les Ostrogoths, les Burgondes, les Alamans, les Francs, pratiquant peu la lecture et l’écriture, négligeant les écrits des Grecs et des Romains, en pointe surtout sur la métallurgie. En particulier ils avaient inventé au 1er siècle le damassage, combinaison de la torsion, du frappage et de l’assemblage de fer doux et d’acier. Cette technique utilisée pour les épées donna aux Barbares un avantage guerrier. À ne pas confondre avec le démasquinage, insertion de fils d’argent et d’or pour obtenir des effets décoratifs.

Côté Orient, les Arabes devenus musulmans et les Byzantins, vont continuer, eux à développer une culture technique basée sur les acquis des Grecs, très au-delà de celle des Barbares.

Jusqu’au 18ème siècle le fer était fabriqué dans des fourneaux construits en 3 parties, le creuset, base recevant le métal, la cuve en briques réfractaires recevant un mélange de minerai et de charbon de bois et le gueulard, entrée supérieure à partir de laquelle on approvisionnait le four. Le produit brut obtenu était la loupe, affinée par martelage pour obtenir du fer.

En Orient, les Byzantins furent de bons constructeurs notamment Anthémius de Tralles, architecte de Sainte-Sophie à Constantinople (Istanbul) au 6ème siècle, église chrétienne au départ, devenue mosquée puis aujourd’hui musée.

En 678, Kallinikos (non confirmé) invente le feu grégeois, outil militaire pour mettre le feu chez l’ennemi à partir d’un mélange de naphte, de chaux et de salpêtre (nitrate de potassium).

Les Byzantins connaissent également le naphte (pétrole) combustible et ne se mélangeant pas à l’eau qui, mêlé à des solides tels que la résine, le charbon ou le bois pulvérisés permet de fabriquer une pâte flottant sur l’eau pour enflammer des bateaux ennemis. Projetés par des tuyaux avec une pompe, on obtient un lance-flamme.

Le Moyen Age est entièrement dominé par la religion. Les savoirs sont conservés et exploités dans les monastères. Ils s’intéressent aux techniques agricoles et artisanales nécessaires à leur vie autarcique et à celle des édifices religieux nécessaires à leur exercice. Ce sont les moines bâtisseurs qui sont à l’origine des cathédrales, caractéristiques de cette époque.

Quelques inventions importantes cependant : au 8ème siècle celle de l’étrier qui révolutionnera le rôle de la cavalerie, au 9ème siècle le collier d’épaule et le fer à cheval. À partir de l’époque de Charlemagne, le fer devenant plus courant, on invente la broigne, vêtement renforcé d’anneaux de fer, l’armure et la cote de maille ou haubert.

Au 10ème siècle se développe le moulin à eau, connu des Grecs, munis d’arbres à came, invention de cette époque, permettant de transformer un mouvement circulaire en va et vient. Les transmissions et démultiplications se font par engrenages, eux aussi connus des Grecs. Ces développements sont nécessaires du fait de la raréfaction de la main d’œuvre, de l’absence des esclaves, ressources commodes pour les Grecs et les Romains, et permis par l’abondance des rivières.

L’empire romain s’est partagé entre les Mérovingiens puis les Carolingiens à l’Ouest et les Byzantins à l’Est qui seront supplantés par les Arabes, peuple nomade à l’origine. Ces derniers feront le lien avec l’Orient, les Chinois notamment.  En 751, ces derniers sont battus par les Arabes et leurs apprennent le papier que les Chinois fabriquaient depuis des siècles. En 975, une fabrique de papier est fondée à Bagdad.

C’est au début du 12ème siècle que les Arabes introduisent le moulin à vent, invention provenant d’Afghanistan. Ils poursuivent les travaux des Grecs sur les matériaux et leurs combinaisons sous le terme d’alchimie qui seront repris par les Occidentaux, avec 3 projets de transformation de la matière, la pierre philosophale, l’élixir de longue vie et la panacée. Ces recherches de combinaisons aboutiront plus tard à la chimie.

Les Arabes inventent la distillation dans un alambic. La boussole apparait au 13ème siècle.

Le symbole du Moyen Age est incontestablement les cathédrales. Elles sont l’édifice religieux emblématique du diocèse où siège l’évêque. Les premières églises et cathédrales s’inspirent des basiliques romaines jusqu’au 12ème siècle, c’est l’art roman, basé sur des voûtes en berceau (arcs en plein cintre = demi-cercle).

À partir du 12ème siècle et particulièrement en Ile de France une innovation apparait : la croisée d’ogives qui répartit mieux les forces entre les piles et les murs. Les ogives sont des arcs de plein cintre posés en diagonale, les doubleaux sont les arcs perpendiculaires aux murs et les formerets les arcs parallèles. Ces derniers sont de fait des arcs brisés de façon à ce que les sommets des arcs forment un plan. Ces techniques permettront de créer des ouvertures dotées de vitraux. Les arcs boutants seront cependant nécessaires pour tenir les murs notamment lorsqu’ils sont très hauts.

Les travaux de la cathédrale de Chartes débutent en 1134, ceux de celle d’Orléans en 1287. Dans ce laps de temps une trentaine de cathédrales auront été construites en France, en Angleterre (Canterbury), en Suisse (Lausanne) et en Allemagne (Trèves et Cologne).

Détenteurs du pouvoir temporel, les seigneurs ont construit des châteaux forts dont la technique obéissait à des impératifs de défense.

Les universités ont été créées à partir du 13ème siècle. On y formait des clercs, hommes d’église avant tout. On y enseignait la théologie et le droit canon mais aussi la philosophie et la médecine, l’apprentissage des techniques se faisant ailleurs, notamment dans les monastères.

Au 13ème siècle l’Occident redécouvre l’esprit du vin, l’alcool par distillation. La distillation permettra également d’extraire les principes actifs des herbes médicinales.

Les alchimistes découvrent le vitriol vert (sulfate de fer) par grillage de la pyrite, l’huile de vitriol (acide sulfurique) obtenu par chauffage du vitriol vert qui dissout les métaux sauf or, argent et cuivre, le vitriol bleu (sulfate de cuivre) obtenu par grillage de la chalcopyrite. Le mélange de l’huile de vitriol et de sel marin donne l’esprit du sel (acide chlorhydrique) qui dissout les métaux sauf or, argent et cuivre.

Au 14ème siècle l’eau forte (acide nitrique) est obtenue par distillation du mélange de salpêtre et d’huile de vitriol. Elle dissout tous les métaux sauf l’or, ce qui permet de le séparer de l‘argent dans un alliage. L’eau régale est un mélange d’eau forte et d’esprit de sel qui dissout l’or.

Enfin le 13ème siècle a vu l’invention de la brouette et aussi celle de la lunette.

Au 14ème siècle 4 inventions majeures permettront de parler de révolution : la poudre noire, l’horloge à poids, la caravelle et l’imprimerie.

Marc le Grec publie vers 1300 un ouvrage qui décrit la poudre noire dans ses proportions explosives : 6 parts de salpêtre, 1 de soufre et 2 de charbon. Cette idée sera utilisée pour faire des bombardes devenues canons qui évolueront en armes portatives, les couleuvrines. L’explosion est un phénomène nouveau au sens où il n’est pas observable ou proche de ce qu’on peut voir dans la nature, faisant naitre l’idée que la nature pouvait non seulement être imitée, mais dépassée.

La mesure du temps s’est définie avant notre ère par le cycle du soleil qui revient à la même place au milieu des étoiles au bout de 365 jours. Depuis les Grecs on disposait de deux instruments pour mesurer le temps, le cadran solaire et la clepsydre, puis le sablier. L’utilisation de la chute progressive d’un corps au bout d’un corde a pu devenir régulier par l’invention de l‘échappement à partir du 13ème siècle. Ce mécanisme transforme la chute du poids en chutes successives par cliquet actionné par le foliot suspendu à un ressort de torsion qui rythme l’alternance du mouvement. L’horloge prendra place dans les tours ou les clochers.

La navigation fera aussi d’énormes progrès à partir du 13ème siècle. Apparait le gouvernail d’étambot qui permet de guider des gros navires. Vers 1420, les portugais inventent la Caravelle, inspirée des drakkars Viking mais beaucoup plus grands avec 3 mâts, celui de misaine, le grand mât et l’artimon, portant des voiles carrées et des voiles triangulaires. La caravelle nécessitait un équipage de 20 à 30 marins.

Au 14ème siècle la création des universités a pour conséquence l’augmentation de la demande en livres reproduits à l’époque dans des ateliers de copistes. La xylographie permet de reproduire des lettres de début de paragraphe et des dessins. En 1850, Jean Gutenberg a l’idée de créer des caractères en métal (plomb + étain + antimoine) qui aboutira à la typographie.

Ces 4 grandes inventions du 15ème siècle seront suivies d’autres qui leur donneront un développement considérable.

La poudre noire et le canon seront perfectionnés par l’invention de la mèche permettant une mise à feu plus efficace. L’invention de la grenade en 1435 sera une nouvelle déclinaison militaire.

Vers 1410, Bertrand Boysset, arpenteur arlésien, publie « la science de l’arpentage » et « la science du bornage ». Vers 1415, Jean Van Eyck invente la peinture à l’huile. Outre ses applications artistiques, la peinture aura des applications de protection du bois et des métaux. Auparavant, les peintures à l’eau étaient recouvertes de vernis (huile mélangée à l’ambre-oléorésine d’origine fossile). L’idée de Van Eyck a constitué à mélanger les pigments, l’huile et l’essence de térébenthine. C’est à partir de ce siècle que la peinture supplantera  l’architecture dans l’ordre hiérarchique des beaux-arts.

Ces inventions majeures associées à l’essor de la peinture signeront le début de la Renaissance marquée aussi par des évolutions sociales : à côté des seigneurs (le château fort), des clercs (la cathédrale), les bourgeois (le marché) apparaît.

Avec l’augmentation de la taille des fourneaux devenus haut-fourneaux et l’augmentation des températures, apparait la fonte sous forme liquide apte à être moulée, c’est la gueuse.

L’ensemble de ces techniques va faire prendre aux européens une avance considérable qui se maintiendra pendant plusieurs siècles.

La Renaissance : l’instrumentation

Bien qu’il n’y ait pas encore d’école à proprement parler, les intellectuels formés souvent d’abord à la médecine et s’intéressant à la matière qu’ils associent aux mathématiques pour en faire des instruments, prennent de l’importance à côté des autres intellectuels comme l’avocat, le médecin, l’enseignant ou le clerc. On les appelle les ingénieurs de la Renaissance dont Léonard de Vinci est un exemple célèbre.

C’est la fabrication et l’usage du métal qui va nécessiter des instruments. En 1593 Galilée invente le thermomètre, outil qui mesure une autre dimension que géométrique.

Parmi les ingénieurs du 15ème siècle, on peut citer Albert Dürer qui publie ne 1527 un traité sur les fortifications, Sebastiano Serlio qui publie en 1537 L’architettura, Vannoccio Biringuccio dont l’ouvrage posthume De la pirotechnica libri X a été publié en 1540, Niccolo Tartaglia qui publie Questiti et inventioni diverse en 1546, puis sa Nova scienta en 1550 et Travagliata inventione en 1551, Jean Martin qui publie en 1547 une traduction de l’œuvre de Vitruve, Giovanni Battista qui publie en 1554 Del mode du fortificare de cita, La Treille, dont La manière de fortifier villes et châteaux et autres lieux forts parait à Lyon en 1556, Jacques Androuet du Cerceau dont le Livre d’architecture date de 1559, Girolamo Cataneo qui publie en 1564 Opera nuova di fortificare et Dell’arte militare en 1571, Domenico Mora, dont Tre quesiti in dialogo sopra il fare batterie, fortifcare una citta parait en 1567, Jaques Besson qui publie Theatrum instrumentoroum et machinarum liber primus en 1569 puis Art et moyens de tirer huyles de tous médicaments simples et oléagineux en 1573. La liste continue, trop fastidieuse à reprendre ici. Beaucoup d’ouvrages sont agrémentés de gravures.

Besson fut l’inventeur d’un tour à fileter, précurseur de la machine-outil.

L’ingénieur Stévin construit en 1599 un char à voiles, précurseur de l‘automobile.

En 1525, Jacques Galot de Genouillac invente la normalisation des calibres, s’appliquant d’abord aux canons et munitions. Il définit 6 calibres : double-canon, canon serpentin, grande couleuvrine, bâtard, moyen et faucon. La normalisation permettra la fabrication dans des usines distinctes des canons et des munitions.

L’augmentation de la portée des canons interroge la balistique. En effet au-delà de la portée de vue, il faut d’autres repères. C’est Niccolo Tartaglia qui est considéré comme le fondateur de la balistique. Il établit que la trajectoire du boulet est courbe sauf dans sa partie initiale et que la portée maximale est atteinte avec un angle de 45°.

Les armes « légères » progressent aussi rapidement avec l’apparition du mousquet, arme des mousquetaires.

À la fin du moyen âge, de nombreux esprits commencent à douter de l’alchimie pour son côté mystique, éloigné de la rationalité qui prenait pied progressivement, mais elle avait posé les bases de nombreuse applications en herboristerie, artisanat ou peinture.

Théophraste Bombast von Hohenheim dit Paracelse a été un opposant influent à l’alchimie traditionnelle. Il désigne la vraie théorie par « chemy » en allemand qui deviendra « chymie » puis « chimie ». Ses œuvres sont dédiées à l’histoire de la médecine et celle de la chimie.

L’ouvrage posthume de Vannoccio Biringuccio De la pirotechnia libri X (1540) est une véritable encyclopédie des techniques y compris chimiques de l’époque. Elle permet d’avoir un inventaire  déjà considérable des substances connues à l’époque.  Notamment il évoque le charbon de terre pour son très fort potentiel calorifique. Il faudra attendre 1589 pour que la houille permette avec succès en Angleterre de réduire (le débarrasser d’un partie de son carbone) le minerai de fer.

En publiant en 1530 Bermannus sive de metallica dialogus, ouvrage sous forme de dialogues, Georg Bauer Agricola pose les bases de la terminologie qui permet de désigner une matière sous un nom unique. Son second ouvrage posthume De re metallica libri XII édité en 1556 est une somme des connaissances minières et métallurgiques de l’époque, dans la continuité de celui de Biringuccio.

Avant le Renaissance la liste des métaux était liée selon des principes astrologiques à celle des 7 planètes connues. Ce système n’aura plus de sens avec l’héliocentrisme (la terre tourne autour du soleil) de Copernic. La liste des métaux s’allonge avec l’arsenic, l’antimoine, le zinc et le bismuth.

À la fin du 16ème siècle l’instrumentation a donné aux savants le moyen de connaître la nature. Les ingénieurs de la Renaissance auront à cœur de transformer le monde plutôt que de le découvrir.

André Vesale, avec De humani corporis fabrica paru en 1543 révolutionne la médecine avec notamment le scalpel qui permet d’observer ce qui se passe dans le corps plutôt que de le deviner.

En 1588 Christopher Marlowe écrit The tragical history of doctor Faust, une des premières œuvres de science-fiction.

Le 17ème siècle : les manufactures

Le développement des puissances économiques et coloniales appellent un changement d’échelle qui ira s’accélérant le siècle suivant.

Après avoir inventé le thermomètre, Galilée, le dernier grand savant ingénieur de la Renaissance, invente en 1609 la lunette astronomique, deux instruments essentiels pour la mesure et l’observation.

L’observation et l’expérimentation s’érigent en méthode expérimentale, cheville ouvrière de la Révolution Scientifique.

Par l’observation et la mesure, Galilée élabore les concepts de vitesse et d’accélération. Ainsi il calcule que la distance parcourue est proportionnelle au carré du temps écoulé (d = 1/2at²), a étant l’accélération (pour le cas de la chute d’un corps, l’accélération de la pesanteur est g = 9,806). Il en déduit la vitesse, v = at. Ce sont les équations du mouvement rectiligne uniformément accéléré.

En 1615 Salomon de Caus fonde la dynamique. Il distingue le travail, dans la formule T = Ph, P étant le Poids et h la hauteur et la force (s’agissant de la chute d’un corps, la force est égale au poids).

Dès la fin du 16ème siècle, l’idée de disposer deux lentilles aux extrémités d’un tube permettait de rapprocher les objets vus à travers cette lunette. Galilée a eu l’idée de la diriger vers le ciel pour en faire une lunette astronomique.

En 1607, Victor Zonca publie Nuovo teatro di machine ed edifizi per varie e sicure operazioni, sur les théâtres de machines chers à la Renaissance. La même année Bartolomeo Crescenzio publie Nautica Mediterranea où il théorise la fabrication des navires. Vers 1616 Fausto Veranzio publie Machinae novae où il décrit notamment le premier parachute, sous forme de pyramide à base carrée. En 1624, Edmond Gunter publie Description and use of the sector, the cross-staffe and other instuments qui décrit notamment la règle à calcul. EN 1631, Pierre Vernier publie en 1631 La Construction, l’usage et les propriétés du quadrant nouveau de mathématiques où il décrit notamment le dispositif permettant de mesure les petites distances, le Vernier du pied à coulisse.

Beaucoup d’autres publications sont mentionnées dans le livre et non reproduites ici, ce qui montre le foisonnement des recherches et la dynamique de diffusion des connaissances au début de ce siècle.

René Descartes avec le Discours de la méthode paru anonymement en 1637 pose les bases de la pensée rationaliste et tourne le dos à la scolastique, enseignement qui associe la pensée grecque à la théologie chrétienne. C’est à partir de là que les hommes vont devenir les maîtres et possesseurs de la nature.

Le Discours de la méthode comprend trois traités, un de géométrie, un consacré aux météores et un autre intitulé Dioptrique. C’est là qu’il publie sa découverte sur la loi de réfraction, plus complexe que la loi de réflexion, qui aura des applications en optique.

La première manufacture de soierie a été fondée à Tours en 1466, mais c’est au 17ème siècle avec Colbert à partir de 1664 qu’elles se développent. La manufacture royale des tapisseries de la Couronne a été fondée par Colbert  en 1662, qui fonde également celles de Beauvais  et d’Aubusson. En 1665 il fonde la manufacture royale Van Robais pour la fabrication de draps et de dentelle. La Compagnie Royale des Glaces est fondée en 1665. D’autres manufactures de draps sont fondées à Saptes en 1666 et à Villeneuvette en 1675. Colbert fonde la Manufacture royale des meubles en 1667 plus connue sous le nom de Manufacture des Gobelins, liste non exhaustive.

Les manufactures ne reposent pas sur des inventions nouvelles mais sur un perfectionnement constant pour produire en plus grande quantité avec une meilleure qualité.  En 1669 Colbert institue la fonction d’inspecteur des manufactures, fonction dédiée à des ingénieurs, date marquante dans l’évolution leur métier.

Les techniques militaires font l’objet de nombreuses publications. Dans la première moitié du siècle la cartouche se généralise. C’est un cylindre de papier qui contient la poudre noire. Déchirée avec les dentes, la poudre est versée dans le canon, puis enfoncée dans le canon pour séparer la poudre de la balle le tout étant tassé avec une baguette. Jean Martinet invente la baïonnette en 1669 qui sera perfectionnée par Vauban avec une fixation par douille qui permet de tirer sans avoir à enlever la baïonnette. Sous Louis IV Vauban, nommé commissaire général aux fortifications en 1678, développe les fortifications dont l’art ne sera publié qu’après sa mort en 1737, considérant de son vivant que l’adaptation au terrain échappait à toute règle.

L’architecture navale connait les mêmes évolutions. Si la Caravelle Santa Maria de Christophe Colomb mesurait 20 m de long, 8 m de large avec une capacité de 600 tonneaux, le vaisseau français La Couronne était en 1636 le plus grand de la flotte sous Richelieu avec une  longueur de 63 m, une largeur de 17 et une capacité de 2000 tonneaux. Il faut noter aussi les progrès en matière de conception des voiles qui permettait de manœuvrer quelle que soit la direction du vent. Ces évolutions ont été permises par l’évolution de la mathématique avec les logarithmes, la géométrie analytique et l’analyse infinitésimale.

En 1623, Wilhelm Schickard fabrique la première machine à calculer capable de faire les additions et les soustractions, se limitant cependant à des nombres de 6 chiffres. En 1645 Pascal met au point une machine à calculer la Pascaline.

En 1661 il crée une société de carrosse public avec itinéraires et heures fixes, précurseur des transports en commun.

En 1669, Roberval invente la balance du même nom. Sa novation tient au fait que les plateaux sont soutenus par le dessous et non pas suspendus comme auparavant.

Au début de la seconde moitié du 17ème siècle Christian Huygens invente l’horloge à pendule basée sur le principe de l’isochronisme du pendule simple connu depuis Galilée. Cette horloge sera perfectionnée jusqu’à atteindre avec George Graham en 1721 la précision d’une seconde par jour.

En 1662 Samuel Morland perfectionne la Pascaline au sens de la miniaturisation et en conséquence de la portabilité. Gottfried Wilhelm Leibniz concevra une machine à calculer pour les 4 opérations qui n’aura pas de suite commerciale. En 1666 il publie Dissertatio de arte combinatoria dans lequel il comprend la simplification que constitue le calcul binaire qui aura un grand avenir au 20ème siècle. Il en fera une publication spécifique en 1703.

Le 17ème siècle a également inventé le périodique, publication régulière. Par exemple Théophraste Renaudot  fonde en 1631 La Gazette qui sera suivie du Journal des savants en 1665, tout comme à Londres Philosophical Transactions. Leibniz lance Acta Eurditorium en 1682. Ainsi la communauté scientifique dispose à la fin du 17ème siècle de trois périodiques en français, anglais et latin qui contribueront à l’accélération du progrès technique par la diffusion de l’information et la coopération induite.

Evangelista Torricelli (1708-1747) comprend que c’est la pression atmosphérique qui maintient le mercure dans un tube retourné et découvre le vide (sujet polémique à l’époque) et par la même occasion il invente le baromètre. À la fin des années 1940, Pascal démontrera que la pression atmosphérique varie avec l’altitude. Il est démontré que la pression atmosphérique est de 76 cm de mercure au bord de la mer et donc 10,33 m d’eau ce qui explique les problèmes de pompage au-delà de cette hauteur.

À Magdebourg (Allemagne orientale) en 1672,  Otto von Guericke démontre la force du vide en essayant de séparer des hémisphères dans lesquels le vide a été fait avec des chevaux, expérience décrite en 1672. Cette observation l’amène à s’intéresser à l’évolution des corps célestes dans le vide et il distinguera le magnétisme mis en œuvre dans la boussole et l’attraction (électricité) exercée par un morceau d’ambre frotté avec un chiffon ou plus tard par une boule de soufre en mouvement. Cette « machine » n’aura pas d’autre avenir que de figurer dans les laboratoires de physique.

À partir de cette notion de vide, Christian Huygens essaie de produire un mouvement alternatif sur l’idée du canon. La machine qu’il réussit à construire avec l’aide de Denis Papin fonctionnait avec difficultés mais posait les bases du moteur à explosion.

En 1679, Denis Papin invente la marmite à pression munie d’une soupape de sécurité, ancêtre de la cocotte-minute.  En 1687 il reprend le principe de Huygens en utilisant la force de la vapeur pour pousser un cylindre qui reviendra à sa position initiale avec le refroidissement de la vapeur. Cette idée aboutit à une machine décrite dans une brochure ne 1707, conçue pour pomper l’eau. C’est Thomas Savery qui réussira à créer une machine à feu (pompe) en utilisant la force de la vapeur mais sans cylindre ni piston, uniquement en utilisant la force du vide créé par le refroidissement de la vapeur pour aspirer de l’eau.

Le 17ème siècle apportera quelques découvertes chimiques telles que l’indigo extrait de plantes découvertes lors des colonisations. C’est un colorant de cuve, insoluble au départ,  qui nécessite d’être rendu soluble. On aboutit à une solution de trempage des tissus blanc-jaunâtre dont la couleur finale apparait au séchage. Un autre colorant, le carmin, est extrait de la cochenille parasitant le figuier de barbarie, une plante américaine.

De nombreux ouvrages d’architecture sont cités. Cette production est stimulée par l’Académie royale d’architecture fondée par Colbert en 1671.

Ainsi, à la fin du 17ème siècle, la technique se transmet par l’exemple, par le livre, par les revues périodiques et enfin par l’enseignement de l’État.

Le 18ème siècle : la révolution industrielle

Cette révolution repose sur d’un part des méthodes de production qui deviennent industrielles définies par un changement d’échelle, de nombreuse innovations techniques et le recours à l’organisation et d’autre part par l’utilisation du charbon comme source d’énergie propre à alimenter les machines à vapeur. Cette révolution sera centrée sur l’Angleterre et dans une moindre mesure la France puis l’ensemble que l’Europe.

Parmi les techniques dites « de l’espace », la construction, les routes et les canaux et le transport, c’est ce dernier qui a le plus évolué avec une traction chevaline devenue efficace et surtout le transport maritime qui a la capacité d’évoluer à travers les océans et avec des capacités importantes.

Les techniques  de la matière recouvrant celle de l’alimentation ont évolué avec les outils aratoires devenus métalliques et de nouvelles espèces importées des colonies (maïs, tomates, haricots…) et celle des matériaux dont la liste des métaux et de leurs alliages s’est considérablement développée. Parmi eux, le fer devient est métal à tout faire. La chimie a enrichi la liste des matériaux non ferreux dont de nouveaux colorants.

Ensuite les techniques de l’énergie sont passées de la force musculaire à celle de l’eau et du vent, alors que celles du feu, le bois et le charbon de terre, commencent à apparaître à la fin du 17ème siècle.

Enfin les techniques de l’information et surtout de la diffusion des techniques telles que la langue évoluent de langues prédominantes au moyen âge telles que le Grec et le Latin vers les langues des inventeurs et ingénieurs, l’anglais, le français, l’allemand et l’italien. La mathématique est classée ici comme outil de connaissance. Elle a connu des progrès décisifs au 17ème siècle, algèbre, logarithmes, géométrie analytique, calcul différentiel, calcul intégral. Elle va de pair avec l’apparition des outils de calcul et de mesure, machine à calculer, thermomètre, baromètre, balance…

L’exhaure (pompage de l’eau dans les mines) devient un enjeu majeur pour accéder aux couches profondes de charbon. La pompe de Newcomen, dite atmosphérique, devient un outil efficace qui sera transposé pour d’autres besoins de force motrice.

L’accroissement du nombre de substances a conduit la chimie à des essais de systématisation avec la théorie du phlogistique développée par Georges E. Stalh. Elle considère que les substances se transforment les unes dans les autres selon quatre processus : la combustion, la calcination, la fermentation  et la putréfaction. Cette théorie sera abandonnée à la fin du siècle au profit de celle d’Auguste-Laurent Lavoisier. Perfectionnant les travaux de Guyton de Morveau il classera les substances en quatre catégories dans un livre Traité élémentaire de chimie présenté dans un ordre nouveau et d’après les découvertes modernes publié en 1789.

Son classement comprend quatre familles de substances simples (voir aussi http://culturesciences.chimie.ens.fr/content/la-classification-periodique-de-lavoisier-a-mendeleiev-1229#d0e96 ) :

  • Les substances simples communes aux trois règnes (minéral, végétal et animal) : lumière, calorique (chaleur), oxygène, azote, hydrogène
  • Les substances simples non métalliques, oxydifiables et acidifiables : soufre, carbone, phosphore, radical muriatique, radical fluorique, radical boracique.
  • Les substances simples métalliques, oxydables et acidifiables : 17 métaux
  • Les substances simples salifiables et terreuses : chaux, magnésie, baryte, alumine et silice

Dans le domaine de l’instrumentation, en 1707 Francis Hauksbee améliore la boule de soufre de Guericke en la fabriquant en verre. Cet objet permet de découvrir les phénomènes électriques.

En 1709, Fahrenheit construit un véritable (au sens de mesures reproductibles) thermomètre  à alcool puis à mercure. Le 0 correspond à la température la plus base possible à l’époque avec un mélange de glace de sel et d’eau, le repère suivant, 4, correspondant à la température de la glace dans l’eau, puis le repère 12 correspondant à la température du corps humain. Ces repères seront multipliés par 8 ensuite.

En 1727, Stephan Hales invente la cuve pneumatique ou cuve à eau qui permettra de contenir les gaz et de les étudier.

En 1730, Réaumur construit un thermomètre à alcool gradué de 0 à 80 degrés. En 1742, Anders Celsius, un suédois, propose de nouveaux repères, 0 pour l’eau bouillante et 100 pour la glace fondante. La Suède et la France se mettront d’accord pour inverser les repères, 0 pour l’eau glacée et 100 pour l’eau bouillante, ce sont les degrés centigrades.

En 1783, Horace de Bénédict de Saussure invente l’hygromètre à cheveu et Lavoisier et Laplace inventent le calorimètre.

En 1787, Abraham Bennet invente l’électroscope, composé de 2 feuilles en or suspendus par un fil de cuivre dans une enceinte en verre, qui permet de détecter les objets électrisés.

En 1735 John Harrison construit le premier chronomètre portable, très utile en navigation pour déterminer le temps passé depuis le départ du bateau et en conséquence la longitude. Il perfectionnera son invention pour arriver en 1761 à fabriquer un chronomètre de 13 cm de diamètre et pesant 1,5 Kg.

En 1725 parait l’œuvre posthume de Pierre Varignon  Nouvelle mécanique ou statique dont le projet fut donné en 1687.  À partir des travaux mathématiques de Descartes, Newton et Leibniz il va éclairer définitivement les concepts fondamentaux de la mécanique. Il distingue la vitesse instantanée de la vitesse moyenne. Pour une trajectoire circulaire, il définit la vitesse angulaire, la vitesse linéaire qui est le rapport de la distance parcourue (2 pi r) au temps. En un point X d’un déplacement AB la fonction est e = f(t), la vitesse instantanée est la dérivée  première de f : a = de/dt, l’accélération est la dérivée seconde de f : a = d²e/dt².

En statique il définit le parallélogramme des forces. En dynamique on reste sur les acquis de Newton qui distingue la masse m (quantité de matière exprimée en Kg) du poids P (qui est une force) exprimé en Newton avec P=mg, g étant l’attraction de la pesanteur sur terre.

Bertrand Forest de Bélidor fut un ingénieur militaire qui intégra les connaissances mathématiques dans l’artillerie et le génie. Ainsi il calcule l’épaisseur d’un mur capable de résister à son renversement en fonction de sa hauteur (bras de levier), de sa largeur (moment = distance du point de basculement au centre de gravité) et de la masse volumique du mur. Bélidor est à la base de la théorie de la stabilité des constructions.

Bélidor s’intéresse également à l‘artillerie avec Le bombardier français  ou nouvelle méthode pour jeter des bombes avec précision, publié en 1734. Il donne la méthode pour construire une table de tir, c’est à dire la portée du tir en fonction de son inclinaison pour un projectile et une charge explosive donnée. Ses nombreuses publications feront avancer de manière importante ce qui constitue la mécanique, c’est à dire l’étude des forces et des mouvements.

Pierre Bouguer, un ingénieur naval, est un des fondateurs de la photométrie qui mesure la lumière en candela à partir d’appareil photométriques.

Henri-Louis Duhamel de Monceau a fondé l’école de la marine en 1741. Il publie sur l’architecture navale et contribue à des avancées en hydrostatique (flottabilité) et en hydrodynamique (écoulement des fluides). Il a publié aussi sur les draps et les étoffes.

John Smeaton est reconnu par les historiens anglais comme le créateur de la profession d’ingénieur civil. Il retrouve la formule du mortier capable de durcir sous l’eau, le ciment obtenu par mélange de chaux et d’argile de type « pouzzolane » fortement calciné et concassé.

Les écoles d’ingénieur ont pris une voie très différente en Angleterre, basée sur les organisations professionnelles et en France sur des écoles d’État.  En 1715, la charge de Directeur général des Ponts et Chaussées est créée. En 1716 l’Angleterre fonde la Royal Military Academy pour la formation d’ingénieurs militaires.  En 1741, Duhamel de Montceau fonde l’École de la marine. En 1744, Charles-Daniel Trudaine fonde le Bureau des dessinateurs du Roi qui deviendra en 1747 l’École des ponts et chaussées. L’École des mines est fondée en Espagne en 1777 puis en France en 1783. En 1794, Gaspard Monge fonde l’École centrale des travaux publics qui deviendra en 1795 sous le Convention l’École polytechnique. Cette dernière fonde le métier d’ingénieur sur des bases mathématiques de haut niveau. Enfin, en 1794 est fondé le Conservatoire des Arts et métiers pour former les spécialistes destinés aux manufactures. À la fin du 18ème siècle ces écoles d’ingénieurs sont une spécialité française, peu imitée en Europe.

La Révolution Industrielle n’est pas définie ici par le machinisme ou le charbon comme source d’énergie mais par la rationalisation technique et économique de la production, autre définition de l’industrie et aussi on pourrait dire par le changement d’échelle. Le moteur de l’industrialisation est la recherche du profit, théorisée par Adam Smith en 1776 et la méthode la recherche de gains de productivité ce qui pousse aux économies d’échelle et à l‘augmentation de la taille des usines.

En 1763 James Watt perfectionne la machine de Newcomen en inventant le condenseur où la condensation de la vapeur ne se fait plus dans le cylindre mais dans une chambre séparée.  Il s’en suit la création de la machine à vapeur en 1773 par James Watt et Matthew Boulton.

En 1769 Nicolas-Joseph Cugnot invente le fardier à vapeur, premier véhicule automobile.

En 1775, John Wilkinson invente l’aléseuse, machine-outil qui permet de forer avec précision l’intérieur d’un cylindre, ce qui permet d’améliorer l’étanchéité à la vapeur des systèmes cylindre-piston.

En 1781, Jonathan Hornblower invente la machine compound à deux cylindres. Au cylindre « haute pression » s’ajoute un cylindre « basse pression » qui utilise le potentiel résiduel de la vapeur après passage dans le cylindre haute pression. La même année, Watt invente la machine à double effet, c’est-à-dire que la vapeur sert à soulever le piston et aussi à revenir à la position initiale. Cela nécessite un système de soupapes.

En 1784, Watt invente le cheval vapeur, notion permettant de montrer le nombre de chevaux auxquels la machine à vapeur pouvait se substituer. En 1787 il invente le régulateur à boules ou régulateur centrifuge. Ce mécanisme permet de réguler la vitesse de rotation initiée par les pistons en agissant sur l’admission de la vapeur dans les cylindres, c’est l’apparition du concept de rétro-action.

En 1786, William Symington invente le bateau à vapeur.

Les machines à vapeur ont connu au 18ème siècle un essor exponentiel, plus de 2000 construite en Angleterre dont plus de 1000 dans la dernière décennie. Elles seront utilisées dans une grande variété de secteurs, par exemple l’industrie textile et l’agriculture avec la batteuse à vapeur.

L’invention des chambres de plomb nécessaires pour la fabrication industrielle de l’acide sulfurique permettra le développement de la fabrication de beaucoup de produis chimiques, autres acides, sels…

En 1791 Nicolas Leblanc dépose un brevet de fabrication du carbonate de soude en deux phases. La première consistait à fabriquer de l’acide muriatique (chlorhydrique) et du sulfate de soude en faisant agir de l’acide sulfurique sur du sel marin. Ensuite un mélange de sulfate de soude avec du charbon et du calcaire est mis à calciner dans un four. Le résultat est hydraté ce qui permet d’obtenir la carbonate de soude après séchage. Ce produit connaitra de nombreuses applications dont la fabrication du savon de Marseille.

En 1875, Claude Berthollet publie un mémoire sur l’acide marin déphlogistiqué appelé plus tard l’acide oxymuriatique, repéré pour ses propriétés blanchissantes. Mathieu Vallet et Léonard Alban, installés à Javel, ont l’idée de désacidifier cet acide par un alcali (potasse ou soude). Le résultat est un liquide jaune qui fera son chemin sous le nom d’eau de Javel.

En 1727, Heinrich Schulze découvre le noircissement des sels d’argent par la lumière.

En 1748, William Cullen invente la réfrigération artificielle sans glace en utilisant l’évaporation de l’éther qui absorbe la chaleur.

Alors que dans les mines, les brouettes ou wagons servant à transporter le minerai, circulaient sur des chemins couverts de planches, en 1765, les anglais ont l’idée de les faire circuler sur des rails en fonte. C’est l’invention du chemin de fer.

En 1781 est inauguré en Angleterre à Coalbrookdale le 1er pont en fer, construit par Abraham Darby en collaboration avec John Wilkinson et Thomas Farnolls Pritchard d’une portée de 30 m et de 6 m de largeur.

En 1782 Ami Argand perfectionne la lampe à huile végétale en y ajoutant une base métallique percée de trous surmontée d’une cheminée en verre. Ainsi la combustion est complète et l’éclairage bien meilleur.

En 1784, Henry Cort dépose un brevet sur l’affinage de la fonte par puddlage. Au lieu d’être mélangée au charbon de bois, la fonte est chauffée dans un four à réverbère (enceinte construite en briques réfractaires) par la chaleur et les gaz issus d’une chambre contigüe chauffée au charbon. Il invente également le laminage dont les rouleaux du laminoir sont animés par une machine à vapeur.

En 1792, Jérémie Benjamin Richter fait éditer Bases de la Stœchiométrie ou l’art de la mesure des éléments chimiques,  ouvrage qui posera les bases de la chimie industrielle.

Avec le développement industriel, la nécessité de transports efficaces et peu coûteux s’est fait sentir. La solution a été trouvée par le développement des canaux (l’eau offrant moins de résistance à l’avancement que le transport terrestre) qui a été très important en Angleterre à partir de 1750. À la fin du siècle la traction a commencé à se faire à vapeur.

La question de la mesure pose cellee de sa justesse. La notion de moyenne de plusieurs mesures apporte une précision et une certitude supplémentaire. En 1786, William Playfair publie The commercial and the political atlas où il présente le diagramme à barres. C’est le début des statistiques.

En 1790 est mentionné le 1er véhicule  à propulsion humaine le célérifère par le compte de Sivrac, non confirmé. En 1817, Carl von Drais von Sauerbronn invente la draisienne, ancêtre de la bicyclette.

En 1791, Claude Chappe invente le télégraphe optique à sémaphores. Il comprend un système physique avec des sémaphores, bras articulés soutenus par des poteaux et un code comprenant 96 signaux.

En 1783, les frères Joseph et Etienne Montgolfier lancent à Annonay la 1ère montgolfière, grand ballon de 11 m de diamètre en rempli d’air chaud plus léger que l’air. Parallèlement Alexandre Charles réalise un ballon à gaz inflammable (l’hydrogène 15 fois plus léger que l’air), gaz obtenu par action des acides sulfurique ou chlorhydrique sur le fer dont la toile est rendue étanche par le caoutchouc.

Toujours la même année, Jean-Pierre Minckelers s’intéresse à un autre gaz inflammable, le gaz de houille (méthane essentiellement) quatre fois plus léger que l’air. Cette découverte débouchera sur l’éclairage au gaz. En 1799 Philippe Lebon invente la thermolampe qui fonctionne au gaz obtenu par pyrogénation du bois, opération de chauffage du bois en vase clos (hors air) qui permet d’obtenir du gaz (méthane) et du goudron qui connaitra des applications pour l’étanchéité des bateaux par exemple.

En 1799 Louis-Nicolas Robert obtient un brevet pour une machine de fabrication du papier en continu. En 1800 Charles Stanhope invente la presse métallique à imprimer qui diffère de celle de Gutenberg qui était en bois et par le pressage par levier plutôt qu’à vis.

Le 7 avril 1795 la Convention définit le système métrique décimal qui repose sur des repères naturels : le mètre valant de 1/10 millionième du quart du méridien de Paris, le kilogramme correspondant à la masse d’un litre d’eau pure soit 1 dcm3. Des étalons de platine sont déposés aux Archives de la République en 1799. Prise de notes réalisée en Décembre 2019

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